« Pour la pérennisation de l’Islam à Mayotte, l’apprentissage du saint Coran, de ses rites, pratiques, principes, obligations et valeurs, demeure la condition sine qua non.
Une telle tâche ne peut être accomplie que par les parents eux-mêmes. Or ces parents là, qui sont censés transmettre aux générations ces connaissances divines, ont d’autres soucis, des considérations purement économiques. Ils sont cultivateurs, pêcheurs, éleveurs…
Ainsi, ils sont donc appelés quotidiennement à s’absenter du cercle familial. La création d’une structure dite coranique, capable de prendre utilement les enfants en charge, se fait sentir. Les parents Mahorais créent l’école coranique avec la foi et la solidarité communautaire aidant.
Mes chers frères , si nous observons attentivement cette école que beaucoup d’entre nous aujourd’hui accusent de tous les maux (obsolète, obscurantiste, voire dangereuse pour la santé mentale de nos enfants…), nous seront émerveillés du dynamisme éducatif qu’elle dégage. C’est grâce à son enseignement que nous avons pu écrire notre langue.
Voici une institution, sans un local propre, qui, avec des moyens rudimentaires (encre issue de la suie d’une marmite en terre ; la plume étant un morceau de bambou taillé en pointe à son bout ; une planche faisant office de cahier…) est parvenue à faire des Mahorais des hommes lettrés et responsables. Quoi que l’on dise, il n’existe pas d’analphabète à Mayotte. Si tous les Mahorais savent lire et écrire en arabe, sans exception, c’est grâce à cette école coranique tant décriée aujourd’hui.
Ensuite, remarquons ce fait notoire : le Mahorais se sent en sécurité. Il peut se balader d’Est en Ouest, du Sud au Nord, à pieds, dans les sentiers forestiers, et assuré de n’être ni inquiété, ni dévalisé… qu’il fasse nuit ou jour. D’autre part, il y a ce formidable élan de solidarité qui nous unit en permanence, en dépit des apparences. Tout cela, mes chers frères, n’est pas le fait du hasard : l’école coranique est passée par là. Elle a su installer dans la conscience des Mahorais et Mahoraises les valeurs de l’Islam d’une manière très efficace : solidarité, honnêteté, hospitalité, respect de la vie, de l’autre.
Voyons maintenant quelle voie a-t-elle suivi pour parvenir à ces performances, que l’école maternelle laïque n’égalera jamais. Comme nous le savons, l’école coranique mahoraise a des qualités issues directement de l’enseignement qu’elle dispense, à savoir :
- a)Elle est sécurisante :
En effet, une atmosphère de paix émane d’elle, de telle sorte que l’enfant qui pénètre pour la première fois dans son enceinte n’est ni perturbé, ni stressé, car l’école coranique ne présente ni frayeur ni inquiétude. Il apprend tout naturellement les règles harmonieuses de la vie en communauté.
- b)Elle a toujours admis la mixité :
Les enfants apprennent à se côtoyer, filles ou garçons. Et cela se fait sans aucune considération sexuelle. C’est le sens de la parité
- c)Elle ne privilégie aucun enfant :
Ils sont tous assis, sur des nattes, à même le sol, côte à côte, et proches les uns des autres. Ce qui permet de faciliter ce facteur clé de la vie qu’est la socialisation. Tout naturellement, ils apprennent à se reconnaître, à se comprendre, à s’estimer, à s’entraider et surtout à se respecter. C’est tout simplement ce que j’appellerai l’initiation à la solidarité avec ce fameux principe : « Tout se donne, tout se partage ».
- d)Elle responsabilise l’enfant :
Au fur et à mesure que les cours avancent, certains mômes qui sortent du lot manifestent la volonté de prendre en charge leurs camarades en difficulté sous forme de cours de soutien. Ces derniers, une fois jugés aptes par l’enseignant à transmettre le message du saint Coran, accomplissent à coeur ouvert leur mission selon laquelle ils aident pour l’apprentissage de la lecture et de la sainte l’écriture. C’est une fois responsabilisés qu’ils peuvent merveilleusement accomplir cette tâche. Ce sont eux d’ailleurs qui, à l’avenir, vont diffuser à leur tour les préceptes de l’Islam.
- e)Elle aide l’enfant à se prendre en charge :
Parvenu à un certain âge, la fille s’initie systématiquement, elle-même, conformément à l’éducation reçue à l’école primaire, aux tâches ménagères (la cuisine, le repassage des linges, les soins accordés aux bébés…). Cela se répercutera à l’avenir, dans sa vie conjugale.
Quand au garçon, il ira de temps en temps aux champs non pas pour travailler la terre au profit de la maîtresse, comme certaines mauvaises langues auraient tendance à le croire, mais plutôt dans l’optique d’apprendre (on revient encore à l’apprentissage) : maîtriser les paramètres essentiels de la vie paysanne, reconnaître les différents fruits, différencier les comestibles des non comestible, s’initier aux semailles, aux techniques de récolte, au stockage des produit, à leur conservation, à traire les vaches… c’est toute une école de la vie.
Aux alentours de 14 ans, en mettant un terme à l’école coranique, la fille est censée acquérir un paquet d’expérience en matière d’organisation. Le garçon quant à lui est prêt à faire face aux aléas de la vie, à se prendre en charge sur plusieurs points.
Ainsi, l’école coranique est pour tout musulman le point de départ vers l’appréhension de la vie. Celle censée orienter l’individu vers l’honnêteté, le social, la responsabilité et le respect d’autrui.